Le principal effet des sacrements est de communiquer la grâce de Dieu à l’âme. La grâce est « un don intérieur surnaturel, qui nous est donné sans aucun mérite de notre part, mais par les mérites de Jésus-Christ, en vue de la vie éternelle » (Catéchisme de saint Pie X).
Il importe d’apporter quelques précisions sur la grâce. Dieu a appelé l’homme à participer de la vie de la Très Sainte Trinité. « Cette vocation à la vie éternelle est surnaturelle » (Catéchisme de l’Église catholique, n° 1998). Pour nous conduire à cette fin dernière surnaturelle, il nous accorde déjà sur cette terre un commencement de la participation à la vie de Dieu, qui sera plénière dans le ciel. Ce don est la grâce sanctifiante, qui consiste dans un « commencement de la gloire ». Par conséquent la grâce sanctifiante « est le don gratuit que Dieu nous fait de sa vie infusée par l’Esprit Saint dans notre âme pour la guérir du péché et la sanctifier » (Ibid., n° 1999) ; « une participation à la vie de Dieu » (Ibid., n° 1997), qui nous divinise ; donc une vie nouvelle, surnaturelle ; comme une nouvelle naissance par laquelle nous sommes constitués fils de Dieu par adoption, participants ainsi à la filiation naturelle du Fils, « fils dans le Fils ». Elle nous introduit donc dans l’intimité de la vie trinitaire. En tant qu’enfants adoptifs nous pouvons appeler Dieu « Père » (voir Galates 4, 6), en union avec le Fils unique et sous l’action de l’Esprit Saint. C’est la « grâce du Christ », car dans la situation présente — c’est-à-dire après le péché et la Rédemption réalisée par Jésus-Christ — la grâce nous parvient comme une participation de la grâce du Christ : « Oui de sa plénitude nous avons tous reçu et grâce pour grâce » (Jean 1, 16). C’est également la « grâce de l’Esprit Saint », car elle est infusée dans l’âme par l’Esprit Saint au moment du baptême.
Non seulement nous recevons la grâce sanctifiante, mais aussi l’Esprit Saint lui-même : « C’est par les sacrements de l’Église que le Christ communique aux membres de son Corps son Esprit Saint et Sanctificateur » (Ibid., n° 739). Le fruit de la vie sacramentelle consiste en ce que l’Esprit Saint « divinise » les fidèles en les unissant de façon vitale au Christ : « Il guérit et il transforme ceux qui le reçoivent en les conformant au Fils de Dieu » (Ibid., n° 1129). Il nous fait vivre « de la vie du Christ ressuscité » (Ibid., n° 1091).
La grâce sanctifiante s’appelle aussi grâce habituelle, car c’est une disposition stable qui perfectionne l’âme par l’infusion des vertus, pour la rendre capable de vivre avec Dieu et d’agir par son amour. Elle se divise en « grâce première », celle par laquelle l’homme passe de l’état de péché mortel à l’état de grâce ou de justice, et « grâce seconde », qui est un accroissement de la grâce première.
En plus de la grâce sanctifiante, nous recevons des grâces actuelles, c’est-à-dire un don surnaturel « qui illumine notre esprit, meut et fortifie notre volonté, pour que nous fassions le bien et évitions le mal » (Catéchisme de saint Pie X) in actu, dans chaque acte.
Chaque sacrement communique aussi la « grâce sacramentelle » qui « consiste dans le droit qu’on acquiert en recevant un sacrement quelconque, d’avoir, en temps opportun, les grâces actuelles nécessaires pour remplir les obligations qui dérivent du sacrement reçu. Ainsi, lorsque nous avons été baptisés, nous avons reçu le droit d’avoir les grâces nécessaires pour vivre chrétiennement » (Ibid.).
Les sacrements « sont efficaces parce qu’en eux le Christ lui-même est à l’œuvre » (Catéchisme de l’Église catholique, n° 1127). « Le sacrement n’est pas réalisé par la justice de l’homme qui le donne ou le reçoit, mais par la puissance de Dieu » (saint Thomas d’Aquin, Somme théologique III, q. 68 a. 8). Les mêmes paroles et les mêmes actions réalisées séparément et dans un autre contexte seraient dépourvues d’efficacité comme, par exemple, quand un figurant prononce les paroles de la consécration ou de l’absolution lors du tournage d’un film. Ils communiquent une force qui guérit.
Dans le Corps mystique du Christ qu’est l’Église, « la vie du Christ se diffuse en ceux qui croient et qui, par les sacrements, sont unis, d’une façon mystérieuse mais bien réelle, au Christ souffrant et glorifié. Par le baptême, en effet, nous sommes rendus conformes au Christ : « En effet, nous avons été baptisés dans un seul Esprit pour former un seul corps » (1 Corinthiens 12, 13). Par ce rite sacré, l’union à la mort et à la résurrection du Christ est à la fois représentée et effectuée : « Par le baptême, en effet, nous avons été ensevelis avec lui dans la mort » ; et si « nous avons été greffés sur lui par une mort pareille à la sienne, de même le serons-nous par une résurrection pareille » (Romains 6, 4-5). Dans la fraction du pain eucharistique, nous avons réellement part au Corps du Seigneur et nous sommes élevés à la communion avec lui et entre nous. « Parce qu’il y a un seul pain, nous ne sommes qu’un corps malgré notre grand nombre, attendu que tous nous recevons notre part de ce pain unique » (1 Corinthiens 10, 17). Ainsi tous nous devenons membres de ce corps (cf. 1 Corinthiens 12, 27) « et respectivement membres les uns des autres » (Romains 12, 5) » (concile Vatican II, constitution dogmatique sur l’Église, n° 7).
L’existence tout entière acquiert une dimension sacramentelle, car les sacrements accompagnent la vie du croyant de sa naissance à la vie spirituelle par le baptême à sa « naissance à la vie éternelle » qu’est la mort avec, si possible, l’onction des malades et la communion sous la forme du Viatique, en passant par toutes les étapes intermédiaires et, pourquoi pas, la réception quotidienne de l’Eucharistie. La vie devient ainsi un « sacrifice saint, capable de plaire à Dieu » (Romains 12, 1), et la vie morale, modelée par la vie sacramentelle, exprime l’identité chrétienne : « Qu’en voyant vos bonnes œuvres, ils [les autres] glorifient votre Père qui est dans les cieux » (Matthieu 5, 16).